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Bey.Ler.Bey vu par l’Autre bistrot des accordéons

vendredi 13 janvier 2017

dimanche 8 janvier - bey ler bey, "mauvaise langue" : premières impressions d’écoute

Je me suis donné cette journée de dimanche pour découvrir le dernier opus du trio Bey. Ler. Bey ; du moins pour une première approche :

 Les trois albums sous la main : "Jazz/Balkans", 2012 ; "Mauvais œil", enregistré en 2012, mixé en 2014 ; "Mauvaise langue", 2016. Notons au passage l’unité forte suggérée entre ces trois opus par l’unité du graphisme qui les identifie tout de suite comme un ensemble avec une unité d’inspiration manifeste.
 A portée de main, un carnet de notes à prendre au fil de cette première écoute. Sans, pour l’instant, chercher à classer ou ordonner mes premières impressions.

D’abord, je suis frappé - forcément - par les titres respectifs des trois albums où l’adjectif mauvais apparait dans les deux plus récents. Mais, auparavant, notons une indication d’importance comme titre du premier : Jazz/Balkans. On a là les deux axes ou les deux pôles, comme on voudra, de la musique du trio. Une inspiration puisée aux sources balkaniques croisée avec des influences venues du jazz. Une certaine fidélité, mais en toute liberté d’inspiration. D’où un son et des harmonies mixtes, pour ne pas dire métisses, qui sont la signature même du trio. Et puis, cette information donnée en titre dans les albums suivants : : "Mauvais œil" et "mauvaise langue". Caractéristiques de l’humour du trio. D’un côté, le mauvais œil, qui connote une influence trouble et maléfique ; le mauvais sort. Une illustration qui évoque quelque Méduse aux yeux multiples, mais dont dans l’Antiquité on pensait qu’elle pouvait paradoxalement protéger du dit mauvais sort. De l’autre, la mauvaise langue, qui connote aussi quelque pouvoir maléfique ou, en tout cas, toxique. "Mêm’ pas peur !"

A propos de cet adjectif : mauvais, qui relie entre eux les deux derniers albums, deux réflexions me viennent à l’esprit : d’une part, je remarque que Florian se produit en duo live sous le nom "Mala cabeza / Tango dégénéré". Il n’y a pas de hasard. D’autre part, je me dis qu’en toute logique on pourrait bien voir son prochain album intitulé "mauvaise graine" ou quelque chose du même acabit. Mais encore, il me vient à l’esprit que cette mauvaise graine aurait bien pu être aussi le titre de l’un des albums de Pulcinella, Florian Demonsant assurant le lien entre ce quartet et le trio de Bey. Ler. Bey. Du coup, comment ne pas penser à "mauvaises herbes" ? [*]

Si j’en viens maintenant à mes premières impressions d’écoute, ce qui domine pour moi, c’est que je ressens "Mauvaise langue" comme une musique crépusculaire : lueur du lever du jour, d’une part, lueur du coucher du jour, d’autre part. Une lumière ni solaire, ni nocturne. Non. Une musique qui pourrait surgir tout à coup dans un espace désertique. Quelque chose comme des rythmes gnaouas explosant comme un feu d’artifice sur le sol aride du désert sud-marocain.

S’il est manifeste qu’une unité forte traverse les trois albums comme un fil rouge, il est non moins évident que les trois albums ont une structure différente entre eux : "Jazz/Balkan" est composé de huit titres ; "Mauvais œil" de vingt, de durées fort différentes ; "Mauvaise langue", de quatre titres, eux-mêmes dissemblables quant à leur durée :

1. "Jacasseries", 9:22
2."Bon sauvage", 4:59
3."Aphone", 18:53
4."Naufrage", 10:33

Tout en écoutant ces quatre titres, notamment "Aphone", il me semble évident que c’est une musique qui implique de la part de l’auditeur un certain "lâcher prise", une manière de se laisser immerger dans cette musique suivant cette attitude que les psychanalystes qualifient d’attention flottante. Une manière de se laisser aller au fil des méandres de l’imagination du trio. Juste pour se laisser guider par leur créativité. Autre image qui me vient à l’esprit : le labyrinthe. Une image qui pourrait assez bien traduire l’impression que l’on a en se laissant porter, par exemple, dans le dédale d’"Aphone"...

Pour finir, à propos du style du trio, je pense à cette scène de cinéma où Raimu explique à Marius le dosage du pastis. Bey. Ler. Bey, c’est deux tiers d’inspiration balkanique et orientale - la clarinette et autre bendir ou darbouka -, un tiers de jazz - l’accordéon - et un grand tiers de créativité...

[*] A propos de mauvaises herbes, je me dis que "la zizanie" pourrait assez bien qualifier le style de Pulcinella jusqu’à aujourd’hui. La zizanie, cette mauvaise herbe, qui sème perturbations, dérangements et agitation sur son chemin. Qui sème la zizanie, récolte la tempête !

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